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Projet d'une vacherie de 40 laitières en stabulation permanente

En constatant les développements que prend l’industrie laitière dans les différentes régions de la France, et en considération des nombreuses questions qui nous sont adressées, nous avons demandé à notre ami et collaborateur, M. Max Ringelmann, de dresser un projet de vacherie pour 40 bêtes en stabulation permanente, auquel est annexée la planche coloriée ci-jointe.

L’exposé suivant indique les procédés employés pour déterminer tout ce qui intéresse la construction de la vacherie ; en suivant l’auteur, chacun pourra apporter aux bâtiments dont il dispose les modifications exigées par les conditions spéciales dans lesquelles il se trouve.

DONNÉE GÉNÉRALE. - Vacherie de 40 laitières (1 [note non reproduite ici]) tenues en stabulation permanente. - Tel est, en peu de mots, le programme qui doit servir de base à la rédaction de notre projet, dans la discussion duquel nous suivrons un ordre méthodique, qu’on doit toujours appliquer à la résolution pratique d’un problème de ce genre.

A. DIMENSIONS ET DISPOSITIONS GÉNÉRALES

1. Emplacement par animal. - L’emplacement affecté à chaque animal doit être suffisant pour qu’il puisse s’y coucher à l’aise (2 [note non reproduite ici]). Considéré sous ce point de vue, cet emplacement est un rectangle dont les dimensions sont en rapport avec la taille des animaux.

Nous admettrons qu’il s’agit, pour le présent projet, d’animaux de grande taille (vaches hollandaises, flamandes, normandes, etc.) ; il faudrait réduire les dimensions s’il s’agissait d’animaux de petites races (3 [note non reproduite ici]).

Les vaches de grande taille occupent, couchées, un rectangle de 1,2 m de largeur sur 2,1 à 2,2 m de longueur ; la surface à donner à chaque animal devra donc être de 1,5 à 2,5 m ; il serait inutile et même peu économique de l’augmenter, car on immobiliserait, dans la construction, un capital improductif (4 [note non reproduite ici]).

2. Nombre d’animaux. - La réunion d’un certain nombre d’individus quelconques dans le même local est par elle-même une cause d’insalubrité ; la réunion permanente favorise la propagation des maladies contagieuses ; pour les grands mammifères, il convient de fixer au maximum à 20 le nombre d’animaux réunis dans la même pièce. C’est le chiffre que nous adopterons en divisant la construction en deux étables distinctes.

Nous admettrons qu’on devra loger deux taureaux, bien qu’un seul serait suffisant pour le service des 40 vaches de l’étable ; mais il est préférable de pouvoir disposer de la place nécessaire pour un taureau de remplacement.

La zootechnie nous enseignant que, lors de l’exploitation des vaches en vue de la production du lait, on doit acheter les animaux à leur premier ou à leur deuxième veau, il sera inutile de réserver un emplacement pour des élèves ; les veaux seront vendus très jeunes, et dans ce cas on peut compter sur une présence de 8 veaux à la fois au maximum dans les deux étables.

Le taureau sera placé à une extrémité de la vacherie, dans un boxe T de 3 mètres sur 3 mètres environ, pouvant communiquer, par une porte de 1 mètre de largeur, avec une petite cour ou paddock D, entourée de lices ou d’une clôture formée de 3 ou 4 rangs de ronces artificielles maintenues par des poteaux en bois ou en fer ; des pièces de bois bien apparentes, espacés de 0,3 à 0,5 m maintiendront horizontalement les cordons de ronce.

La largeur de l’emplacement de chaque veau sera de 1 à 1,1 m.

3. Dispositions des services d’alimentation et des fumiers. - Les animaux qui ont pour fonction de produire de la viande ou du lait doivent être aussi peu dérangés et excités que possible, conditions qui exigent un couloir d’alimentation C ; le service des aliments se fera par un wagon portant des boites ou coffres, contenant les rations, et vu l’importance du troupeau, nous devons admettre que la ferme possède un atelier de préparation mécanique des aliments du bétail ; à cet atelier sera annexé un local ou un emplacement suffisant pour la manutention et la mise en coffres des rations qui seront expédiées à la vacherie par une voie ferrée. Il n’y aura donc pas lieu de réserver, à la vacherie même, un grand local pour emmagasiner les aliments. Le service des litières et de l’enlèvement des fumiers se fera également par wagonnets, et les voies S seront raccordées avec la plate-forme à fumier.

Pour éviter la transmission des maladies contagieuses, qui peuvent souvent s’effectuer par les litières, chaque étable aura son service spécial d’assainissement (fumier, déjections solides et liquides).

Les deux étables seront en outre isolées par une pièce qui ne servira qu’au passage des aliments, au rassemblement et au refroidissement du lait avant son expédition au magasin spécial ou à la laiterie annexée à la ferme ; cette pièce centrale contiendra les coffres à grains et à sons, le réservoir d’eau, les réfrigérants à lait, les seaux et balances, etc., en un mot, un matériel propre et des produits incapables de communiquer un mauvais goût au lait ; aussi la voie du service des litières ne devra pas passer par cette pièce centrale, mais bien par une porte spéciale à chaque étable.

Chaque étable comportera un lit L pour le vacher.

4. Etable d’observation, infirmerie. - Comme les animaux seront achetés et non élevés sur le domaine, il sera indispensable de les faire séjourner préalablement dans une petite étable d’observation avant de les admettre dans la vacherie, afin d’éviter, dans ce local, l’introduction de bêtes infectées d’une maladie contagieuse. Cette petite étable pourra servir d’infirmerie, mais en tous cas, elle sera aussi éloignée que possible de la vacherie que nous étudions en ce moment.

5. Service d’eau. - Bien que l’hygiène recommande que chaque animal ait à boire à volonté, nous n’admettrons pas les rigoles qu’on a proposé d’accoler aux crèches ; cette disposition oblige, soit à resserrer la crèche, soit à écarter la rigole que l’animal atteint alors difficilement ; d’ailleurs, le prix de revient de l’installation serait trop élevé, la disposition conduirait en outre à une grande dépense d’eau (qui doit y couler d’une façon continue afin d’en assurer le renouvellement), et nécessiterait de fréquents nettoyages qu’on ne serait pas certain de faire faire consciencieusement par les vachers. Mais, comme nous établirons les crèches m en maçonnerie, il sera toujours possible d’y faire couler un filet d’eau à des heures déterminées par le service.

[...]

M. RINGELMANN
Professeur à l'écolle d'agriculture de Grignon,
directeur de la Station d'essais de machines

Source : Extrait de M. Ringelmann , «Projet d’une vacherie pour 40 laitières», 
Journal d'agriculture pratique, 1896, vol. 2, p. 866-873.

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