Scripta n° 132

Numéro Scripta132
Autre(s) référence(s)Tabuteau 481
Auteur(s)Jean II d’Ivry, Avranches (évêque)
Bénéficiaire(s)Avranches, Saint-André (cathédrale)
Genre d'actecharte
Authenticiténon suspect
Datation[1066, 18 juin]
Lieu d'émissionCaen
Action juridiqueautre
Langue du texte latin

Analyse

Guillaume le Bâtard souscrit la pancarte en forme de charte récapitulative par laquelle Jean [d’Ivry], évêque d’Avranches, énumère les possessions de sa cathédrale. Ayant pris connaissance des chartes de l’église et y ayant trouvé de grandes confusions dans les possessions de celle-ci (certaines chartes faisaient référence à des biens qui n’appartenaient pas à l’église, d’autres ignoraient dans leur texte des biens dont elle avait la propriété ; il résultait en effet de ces chartes qu’il y avait un échange fait à la suggestion et sur l’ordre du très glorieux prince Guillaume), l’évêque a fait au mieux les corrections qui s’imposaient, en collationnant les chartes qui, mélangées avec d’autres, étaient par trop fautives. C’est d’abord la terre des Cresnays avec ses dépendances, ainsi que l’église que [le comte] y possédait anciennement sans contestation, la terre de Pontaubault, celle aussi de [Saint-Jean-de-]la-Haize, avec Gée, [Asinguer] et les autres dépendances, le bourg de Ponts avec Malloué et ses autres dépendances, c’est-à-dire les moulins, les prés et l’eau jusqu’à la Roche-Rompue et les terres autour et en-dessous de la ville, et la terre de Celland avec ses forêts, prés, eaux et terres cultivées et non cultivées, la terre que l’on appelle Champeaux, et la terre de Juilley avec ses églises et toutes ses dépendances, c’est-à-dire Poilley, Précey et la terre (…), toutes terres que le comte Richard [II] avait possédées de tout temps et qu’il a octroyées à l’église d’Avranches. L’évêque énumère ensuite les terres, églises, dîmes et moulins que le prince Robert, fils du comte Richard, a concédés à la cathédrale Saint-André, à la demande d’Hugues, évêque d’Avranches : l’église de Saint-Gervais dans la banlieue d’Avranches, avec la dîme de la paroisse et avec les biens que les clercs de l’église possédaient alors, et trois églises avec leurs dîmes, l’une dans le village des Gens avec une charruée de terre, la deuxième dans celui de Céaux avec une charruée de terre, et la troisième dans celui de Vessey avec une charruée de terre ; puis quatre autres églises avec leurs dîmes, à savoir l’église de la Croix[-Avranchin], l’église de Villiers[-le-Pré], l’église de Saint-Senier[-de-Beuvron], dont la paroisse comporte également un moulin sur le Beuvron, et l’église de la paroisse de Vains avec un manse de terre et une terre de deux hommes francs. Ce même prince lui a concédé aussi la dîme de tout le tonlieu de l’Avranchin et la dîme de deux foires annuelles, dont l’une se tient à la Croix[-Avranchin], depuis lors transférée à Saint-James, et l’autre à Avranches, le jour de la Saint-André. Il a également concédé la terre du clerc Gautier, fils de Morin, qui s’appelle Noirpalu, avec l’église et les moulins, et une partie du village de Champeaux, avec la moitié de l’église. Il a donné également la Champagne avec deux moulins et avec une partie de la forêt, et le village de Plomb et celui de Braffais avec les églises et les moulins, et un mesnil avec un moulin aux Gens. Le comte Robert a également donné la terre de Celland, avec ses forêts et ses cours d’eau, ses églises et ses moulins, ses terres cultivées et non cultivées. Il a donné de même le tonlieu perçu dans tout l’évêché ; il a donné de même Chassilly et Saint-Pois, c’est-à-dire la terre de Guillaume Silvain ; mais le fils [du comte], Guillaume, a rendu cette terre au comte de Mortain, et il a donné en échange à la cathédrale la terre du clerc Giraud, frère de Godeflel, c’est-à-dire le village de Saint-Senier[-sous-Avranches], la terre d’Appilly et d’Orceil, avec les églises et les dîmes de son patrimoine et la terre de Ronthon, c’est-à-dire Saint-Pierre[-Langers], Chantore et [Frigabulgam]. Il a également concédé, au lieu du Mesnil-Gilbert, Saint-Ovin avec l’église et les moulins, les terres cultivées et non cultivées et toutes ses dépendances. L’église d’Avranches possède également, d’ancienneté, deux domaines dans le Cotentin, l’un qui s’appelle Coutainville et l’autre Vallière, et toutes les églises de la ville et de ses faubourgs. Le comte Guillaume a également donné, à la demande dudit évêque d’Avranches Hugues, toute la terre que tenait Garnier, frère du portier Thierry, dans l’Avranchin. Baudouin, fils du comte Gilbert [de Brionne], avec la permission du prince Guillaume, a également donné à ladite église, sur la demande de Jean, évêque d’Avranches, plusieurs parcelles de terre qu’il possédait sur la rive du Saultbesnon, lesquelles parcelles ont été incluses par l’évêque dans le parc qu’il faisait construire à grands frais. Le prince Guillaume a également donné à l’église d’Avranches, à la demande de l’évêque Jean, la dîme du tonlieu de Mayenne et celle du passage et de la taxe du grain.

Tableau de la tradition

Éditions principales

a. Pigeon Emile-Auber (Abbé), Le diocèse d’Avranches, sa topographie, ses origines, ses évêques, sa cathédrale, ses églises, ses comtes et ses châteaux, Coutances, Salettes, 1888, 2 vol., n° VI, p. 666-668..

b. Fauroux Marie, Recueil des actes des ducs de Normandie de 911 à 1066, Caen, Caron (MSAN ; 36), 1961, p. 24 n. 24, p. 25-26, n. 29, p. 27 nn. 33 et 37 (extraits, d’après a)..

c. Allen Richard, « Un évêque et sa ville : les évêques d’Avranches de 990 à 1134 », Revue de l’Avranchin et du pays de Granville, 86, 2009a, n° II, p. 38-44..

d. Allen Richard, « Un nouvel acte de Guillaume le Bâtard, duc de Normandie (18 juin 1066) », Bibliothèque de l’Ecole des Chartes, 171, nº. 2, 2013, Annexe, p. 533-536..

Dissertation critique

Complément tradition

La tradition textuelle de cet acte est très défectueuse : en particulier, la fin de la phrase qui commence par « imprimis » (« terram que intime possiderat que Richardus … tradidit ») est manifestement fautive ; Pigeon l’avait reconnu en dotant chacun des deux « que » d’un sic, mais sans proposer de solution, et FAUROUX (p. 24, n. 24) a repris le texte de Pigeon sans même conserver les sic. Et tous deux ont traité la phrase « imprimis » comme un ensemble analogue à ceux d’ « inscripsimus deinde » et des divers « dedit etiam » et « concessit etiam » qui suivent, bien qu’elle soit dépourvue de verbe principal ; nous la voyons plutôt comme la liste des biens impliqués dans le désordre consécutif à la « mutatio » effectuée à la suggestion de Guillaume. La correction du premier « que » en « quam » n’étant pas suffisante pour reconstruire la phrase, nous proposons de conclure à l’existence d’une lacune dans l’identification de « terram », de présumer comme antécédent de « que » un « omnia » récapitulatif, exprimé ou sous-entendu, et de faire de « Richardus » le sujet des deux verbes en ajoutant un « et » après « comes », tout en étant conscient que c’est prendre parti sur le contenu de son patrimoine originel.

Précision édition

Cet acte nous parvient d’un vidimus de l’official d’Avranches de l’année 1377 qui introduit le texte de cet acte par les phrases suivantes :« Universis presentes litteras inspecturis Officialis Abrincensis salutem in Domino. Notum facimus quod anno Domini 1377 die decima mensis julii, nos vidimus et diligentia inspeximus quemdam chirographum seu cartam partitam spectantem et pertinentem Ecclesiæ Abrincensi et præbendis et personis ejusdem ecclesiæ, cujus quidem chirographi seu cartæ tenor sequitur in hæc verba : » (PIGEON, n° VI, p. 666-668).

Texte établi d’après d

Q(uonia)m multa torpore et negligentia pereunt que, si ordine suo subsisterent ut deceret, vigerent, ego Joannes quamvis indignus sancte Abrincen(sis) ecclesie episcopus, cartas ecclesie nostre respiciens magnamque terrarum confusionem in eis inveniens (quamplures enim terrarum possessiones quas ecclesia non habebat carte intra se continebant, quasdam vero quas habebat inscriptione sua ecclesiam habere denegabant ; erat enim ex eis facta mutatio Guill(elm)i gloriosissimi principis hortatu et jussu), que pluribus cartulis confuse titubabant nimium colligens summa veritate correximus ut decebat : imprimis terram Cresney cum suis appendiciis, cum ecclesia quam antiquitus absque calumnia possederat, et terram Pontis Alboldi, terram quoque Haisa cum Gagiaco et Asinguer ceterisque appendiciis, et burgum Pontis cum Maloiaco ceterisque appendiciis, scilicet molendinis et pratis et aqua usque ad Rupem Necatam, et terras in circuitu civitatis et infra, et terram Serlant cum silvis, pratis et aquis, terris cultis et incultis, et terram que Campellis vocatur, et terram Ilgeon cum ecclesiis et omnibus appendiciis suis, scilicet Polei, Pressei et terram […] que intime possederat Richardus comes [et] ecclesiae Abrincen(si) tradidit. Inscripsimus deinde terras, ecclesias, decimas, molendina que Robertus nobilissimus princeps, filius Richardi comitis, qui zelo divini amoris succensus Hierosolimis sepulturam dominicam visitavit, beato Andree prece et hortatu Hugonis venerabilis antistitis concessit, id [est] in suburbiis civitatis ecclesiam Sancti Gervasii, cum decima parrochie et cum possessionibus quas clerici ecclesie tunc possidebant, tresque ecclesias cum decimis : unam in villa que dicitur Esgen cum terra unius carruce, alteram in villa Celsi cum terra unius carruce, tertiam in villa que dicitur Vecei cum terra unius carruce ; quatuor quoque alias ecclesias cum decimis, scilicet ecclesiam Crucis et ecclesiam ville Vileris et ecclesiam Sancti Senerii in cujus parochia super ripam fluminis Bevronis, molendinum pariter tribuit et ecclesiam ville que dicitur Veyn cum uno manso terre et terram duorum francorum. Concessit etiam decimam totius telonei Ab(rincensis) pagi, et decimam de duabus nundinis anualibus, quarum una hab(ebatur) tunc in villa Crucis, modo mutata apud Sanctum Jacobum, altera vero in festivitate sancti Andree Abrincis. Concessit etiam sancti Andree terram Gualterii clerici Morini filii, que vocatur Nigrapalus cum ecclesia et molendinis, et partem ville que dicitur Campellis cum medietate ecclesie. Dedit etiam Campaniam cum duobus molendinis et cum una parte silve et villam que vocatur Plom, et alteram que vocatur Braffays cum ecclesiis et molendinis et unum mosnille cum uno molendino in villa que dicitur Esgen. Dedit etiam Robertus comes terram que vocatur Serlant, cum silvis et aquis, ecclesiis et molendinis, cultis et incultis. De omnicumque episcopatu teloneum similiter dedit. Castiniacum vero et Sanctum Paternum, scilicet terram Guill(elm)i Silvarii similiter dedit ; sed hanc Guill(elmu)s ejus filius comiti Morethonii reddens, pro ea terram Giraldi clerici fratris Godefleli scilicet Sancti Senerii villam, terram Appiliacum et Orsolum, cum ecclesiis et decimis patrimonii sui quas tenebat et terram Rontonis scilicet Sanctum Petru(m) et Cantorias et Frigabulgam in scambio tradidit. Pro Maisnilo Gilberti Sanctu(m) Audoinum cum ecclesia et molendinis, terris cultis et incultis et omnibus appendiciis concessit. Possidet etiam antiquitus ecclesia Abrincen(sis) in Constantiensi pago duas villas, una que vocatur Constantis Villa, altera Valeria, et omnes ecclesias civitatis et suburbii. Dedit etiam comes Guill(elmu)s, precatu Hugonis prefati episcopi Abrincen(si) ecclesie, omnem terram quam tenebat Garnerius frater Theodorici hostiarii in Abrincen(si) pago. Dedit etiam Balduinus filius Guilberti comitis, concedente Guill(elm)o principe, prefate ecclesie, particulas terre quas in circuitu rivuli qui Limon vocatur possidebat, prece et hortatu Joannis episcopi, quas particulas idem episcopus infra Parcum quem cum pecunia construxerat inclusit. Dedit etiam Guill(elmu)s princeps decimam telonei Meduane et transitus et minagii, prece Joannis episcopi, ecclesie Abrincen(si).
Signum Guill(elm)i (crux) comitis. Signum (crux) Malthildis comitisse. Signum (crux) Roberti comitis. Signum (crux) Richardi fratris [ejus]. Signum (crux) Maurilii archiepiscopi. Signum (crux) Balduini [Ebroicensis episcopi]. Signum (crux) Joannis Abrincen(sis) episcopi. Signum (crux) Rogerii Montis Grivou.

Pour citer l'acte :

« Acte 132 », dans SCRIPTA. Base des actes normands médiévaux, dir. Pierre Bauduin, Caen, CRAHAM-MRSH, 2010-2024. En ligne : https://mrsh.unicaen.fr/scripta/doc/sc_132.html [consulté le 09/05/2024].

Création de la fiche

2005-02-04

Dernière mise à jour

2023-12, EMancel